LA CÉRÉMONIE

parcours nocturne festif

5 avril 2012 - 20h - Cour du Tertre

DESCRIPTION IMAGINÉE EN 2011


La cérémonie est basée sur un rituel d'échange des éloges entre disciplines scientifiques.
Elle intègre le maximum d'éléments réalisés par Interim lors de notre temps de résidence.
La conduite complète reste à préciser (nous intégrerons des éléments collectés lors de la résidence, nous laissons le processus ouvert à certains imprévus) mais imaginons un peu :
La cérémonie prend la forme d'un mélange curieux entre une remise de médaille Field, la cérémonie des césars, une prise de parole procédant selon un rituel inventé mais précis et des éléments absurdes ou carnavalesques.
Il y a de la musique par intermèdes (le cœur des philosophes, la fanfare du campus de sciences)
Après l'ouverture de la cérémonie par le doyen de l'université, commencent les prises de paroles ritualisées. C'est l'échange des éloges : des représentants des différents UFR (ou disciplines scientifiques) soit des enseignants, des étudiants, pourquoi pas d'autres personnels, adressent au nom de leur discipline des louanges à une autre (la philosophie à la physique, la physique aux mathématiques, les mathématiques à l'économie, l'économie à l'histoire, l'histoire à la géographie, la géographie à la sociologie, la sociologie à la psycho, la psycho à la biologie etc...)
Une façon de donner une image d'unité, de lien, d'interdépendance, un hommage à l'esprit encyclopédique qui rassemblerait l'ensemble des connaissances scientifiques enseignées à l'université.
Cette proposition s'appuie sur un fait constaté lors de nos premiers contacts : les enseignants font généralement preuve d'un certain charisme, ont l'habitude de parler en public, avec un sens certain de la rhétorique, soit des éléments constitutifs du processus de transmission du savoir.

Ces prises de paroles s'entrecoupent d'intermèdes musicaux, visuels ou performatifs. musicaux : le chœur des philosophes, la fanfare de sciences...
visuels : la voute septine présentée en vidéo, portraits d'universitarium, documents relatifs aux passage de relais du bâton-témoin, etc...
performatifs : gestes inauguraux absurdes et déplacés, on coupe un ruban avec de ciseaux qu'une fillette amène sur un coussin, on scelle une pierre, on fracasse une bouteille de champagne, on tire sur un drap blanc, etc...

De plus, il y a en fin de cérémonie un buffet de nourriture réalisé en workshop avec des artistes d'interim, et à boire.

Les questions phares qui nous semblent importantes et qui sont à l'origine de cette proposition sont les suivantes :
Toute société a ses rites, c'est quelque chose d'important et qui la fonde, qui permet de créer les représentations sociales, symboliques et imaginaires, qui lient les individus entre eux pour faire société. Dans notre monde moderne, et en particulier à l'université qui est le lieu par excellence du savoir scientifique et de sa transmission aux jeunes, qu'est-ce qui relève du rituel, comment l'université s'institue-t-elle? On peut avoir l'impression que ces formes se délitent ou se perdent, ce n'est pas un mal en soi, mais ce qui peut être regrettable, c'est de perdre la beauté et la poésie de ces formes d'art sociales. C'est dans le souci de fournir à l'université un temps collectif, signifiant et poétique correspondant à sa réalité (à son identité) que nous proposons cette cérémonie.

Enfin, il faut rappeler deux aspects importants. Pour qu'elle touche au cœur les acteurs de l'université, cette cérémonie doit d'une part : correspondre à une réalité, être conforme à la représentation que les universitaires ont d'eux-mêmes (même si des décalages poétiques sont possibles) afin d'atteindre une certaine vérité et obtenir l'adhésion et l'implication des participants. Nous voulons faire une vraie cérémonie, pas un spectacle.
D'autre part, pour fonctionner, alors que la gageure de l'affaire consiste à créer quelque chose qui normalement se perpétue ou se transmet, les éléments de la cérémonie doivent être lisibles et interprétables par tous ses acteurs et par son public, aussi nous nous appuyons sur des formes de cérémonie existantes (cérémonie de césars par exemple et autres).

Question d'ordre artistique : les rituels et les cérémonies sont des mises en scène. Ce sont des formes qui utilisent les mêmes outils que l'art (musique, chant, danse, parole, poésie, vêtements, objets, représentations graphiques, etc...). Ces mises en scène sont-elles aux origines de l'art ? S'il existe une fonction pour l'art, ou une utilité, ne serait-ce pas en partie de permettre à un groupe de se voir représenté ? Rituels et art procèdents-ils de la même nécessité ?
« Accompli dans la beauté, fasse que tu marches », disait la prière de guérison indienne...

 

je le trouve très compliqué comme texte, j'ai l'impression qu'on a déjà réussi à faire plus simple.

 

CONDUITE IMAGINÉE LE 29 JANVIER 2012 : 

18h30

Dehors en fin de journée, il fait toujours bien jour: rendez-vous devant le batiment tertre (lettre), au bas des escaliers. Quelques musiciens jouent doucement, des portes drapeaux portent des drapeaux blancs.
Déjà à boire? Non, peut être pas.
Exposition d'universitarium pour la mise en bouche? ou ce n'est pas le bon moment mieux vaut  attendre la nuit.
Distribution d'un "programme": des textes des poèmes des images....
18h45
Déambulation guidée par l'orchestre et les portes drapeaux sur les chemins de béton, (en rang c'est un peu martial mais ça serait beau). Le long du chemin on croise des dessins échappés de la voute, peut être des question(naire)s et des poèmes vernaculaires affichés. Un peu de lecture et de contemplation pour dissoudre et ralentir.
19h00
Passage sous la voute. Choix et remise des questions écharpes
19h15
Arrivée dans la cour.
- Les portes drapeaux se rangent sur les cotés.
- Placement du public guidé? (mais comment, je ne sais)
Pas d' idée de "scéno" pour l'instant. Des zones de couleur? C'est peut être un peu gentil. (Une estrade, une scène? oui ou non?)
- Un moment de musique assez bref et un peu plus bruyant.
- Lumière sur le témoin et sur le présentateur. (mais il fera toujours jour! mettons qu'ils apparaissent)
- Présentation rapide du projet (texte qu'on a écrit?)
- Présentation de Lou et de université tout azimut, lever de rideau sur chronogramme.
- Le présentateur appelle des représentants de chaque discipline. Sont-ce des représentants symboliques, masqués? ou sont-ce des vraies personnaités de cette discipline?
Chaque représentant présente la disipline suivante en forme de louange, (vraie discipline, ou discipline imaginaire? qui contiendait l'arrosage des orchidées, le recrutement, la vie scolaire, que sais-je, mais permet aussi de faire un tour assez vaste de ce que peut contenir l'université) Utilisera t on du vocabulaire vernaculaire, ou des champs lexicaux particuliers?
- Remise de "décorations", pour le coup pas symbolique mais vraiment décoratives. Un jeu de mot quoi.
Des guirlandes, des chapeaux: des accessoires comme on dit dans marie-claire.
20h15

Le temoin circule dans le public, la sculpture alimentaire explose et circule aussi.
Musique un peu solenelle.
20h30
La nuit tombe: projections
21h00
Chant d'un hymne (karaoké) d'éloge général au savoir à la culture, à l'humanité (comme les toast des étudiantes de Sev, sur un air très simple composé peut être pour l'occasion. Cf plus loin les hymnes)
Alcool? Toast?
21h30

Invitation/redirection vers la fête. On donne des souvenirs?
Fin

Bon, le timming est foireux.

Des masques comme ceux des bobos, (voir ci dessus)
ces masques présents dans les cérémonies dansent et se déplacent, peuvent mener une partie déambulatoire, manipuler des éléments d’inauguration et autre et le reste du temps rester assis sans rien faire.

 

Dans un faux film d’ethnographie à faire, on peut mettre des bouts du film très intéressant de la cérémonie des docteurs et Docteur « Honoris Causa » à la cité des congrès de Nantes, 2011 : http://www.univ-nantes.fr/jsp/fiche_actualite.jsp?CODE=1318604227748&LANGUE=0#KLINK

 

 

 

LE DISPOSITIF (LIEU, DÉCOR, DÉROULEMENT)

table remarquable / photomontage à l'arrache
table remarquable / photomontage à l'arrache
dispositif (photomontage pour comprendre ce qui ne se passera pas comme ça)
dispositif (photomontage pour comprendre ce qui ne se passera pas comme ça)
mouvement des acteurs et des invités
mouvement des acteurs et des invités

IMAGINÉE LE 23 JUIN 2011 : Dans la journée du 5 avril 2012, nous nous sommes réunis avec tous ceux qui participent à la performance, pour faire un filage. Nos indications sont simples et précises (peut-être qu'on doit faire des signes au sol avec du blanc pour pelouse, pour que personne ne se trompe le moment venu : où se placer, où se déplacer - cartographie des déplacements)

À l'heure exacte où le soleil se couche, la performance commence.

Au centre du bâtiment Tertre. S'il y a des gradins, c'est pour le public, qui entoure ainsi un espace laissé au niveau du sol, où les paroles et le témoin vont être échangés. Il y a un certain silence, solennel. L'air est encore bleuté, avant la nuit noire : ça donne de l'intensité aux couleurs.
Sur cette scène qui n'est rien d'autre que le sol, piqué de quelques herbes folles : un groupe de personnes, en cercle. Le représentant d'interim s'avance vers le centre. la première personne qui a porté le témoin s'avance vers le centre - ils ne vont pas jusqu'au centre, cependant : le centre, c'est le lieu du baton. le premier, après un court éloge en langue vernaculaire, remet le témoin au second. le second prend le bâton avec soin. il reste seul vers le centre du cercle. la troisième personne qui a porté le bâton s'avance. le second dit un court éloge et confie le baton. etc.
ces prises de paroles seront alternées, par exemple tous les cinq passages, par un chant entonné par le choeur. le choeur est quelque part dans un entre-deux : entre les spectateurs et les performeurs. peut-être qu'ils ont pour eux une petite estrade. ils font le lien entre "la scène et la salle" : explicitent certains dons du baton, attisent le suspense, relatent le parcours du baton quand ce qu'il a vécu est réellement remarquable (par exemple s'il a fait un tour en aviron ou assisté à tel ou tel cours de philo). Tous ces gestes sont précisément minutés. les gens parlent dans un micro.

dans mon imaginaire, ce qui commence ainsi avec les publics assis sur les gradins se délite peu à peu : le public descend, se mèle. peut-être que c'est là que nous devons aller orchestrer les choses discrètement. inviter les gens. peut-etre avec des verres de quelque chose, avec des biscuits de quelque chose. mais la performance continue, tenace. la course lente. c'est pour ça que j'imagine que ça peut durer plus d'une demi-heure. un des membre d'interim filme cette longue performance, retransmise en direct sur un écran.

dans ce grand espace ouvert qui est la scène, il y a aussi le cabinet, avec un membre d'interim qui en assure la consultation (avec gants). à moins que ce soit trop compliqué : tout dépendra du nombre de spectateurs.
il y a aussi un écran, avec des projections de ce que nous avons réalisé pendant notre séjour à l'univ. cette projection constitue un récit, lâche, mais récit quand même. des images les unes à côté des autres, des textes repris de ce qui est déclamé. un film en images lentes.

quelque part, une table avec quelques mets choisis (deux ou trois), créés dans l'atelier comestible. peut-être qu'ici, un chimiste cryogénise un aliment vert. mais ces aliments s'ils sont partagés par tout le monde, n'ont pas pour autant valeur de communion. Sur la table, trône une sculpture.

Olivier Agid : Plan....
Olivier Agid : Plan....
Olivier Agid : Vitry...
Olivier Agid : Vitry...

L'anagramme de CEREMONIES = O, SEMANCIER..........

 

TOUT LE TRALALA : déployer un apparat propre à impressionner

 

 

 

LES GESTES

Des gestes inauguraux : Enlever le drap d’une statue - Casser une bouteille de champagne au bout d’une corde sur un bateau - Ouvrir un rideau - Découper un ruban aux ciseaux - Poser une plaque, une pierre - Lâcher des colombes - offrir un bouquet de fleurs - Lancer du riz ou des pétales...

Je trouve hyper beau la tâche (flaque verticale) de champagne sur le bâteau : c'est un tableau.
J'aime bien les ciseaux géants parceque c'est ridicule
J'imagine bien le sol de la cérémonie rempli de riz et pétales

 

LE BORDEL QUI S'ORGANISE AU FUR ET À MESURE

 

 

pour éclairer  je sais que ce tableau m'avait aidé à paris le voici joint dans le désordre et à compléter
pour éclairer je sais que ce tableau m'avait aidé à paris le voici joint dans le désordre et à compléter

 

LA PRISE DE PAROLE

- Un représentant pour chacun des départements de l'université ou catégorie hiérarchique (un maximum mais pas forcément tous)
MAIS un étudiant pourrait aussi bien représenter son département comme la direction et un technicien de laboratoire prendre la parole pour une louange à la philosophie.

Chaque prise de parole est prise en charge par une personne qui sait exactement ce qu'il a à dire
- Le preneur de parole est volontaire pour représenter ce département ou cette catégorie
- avant chaque prise de parole celui ci se présente et dit ce qu'il représente
- étudiants, professeurs, techniciens, artistes prendront la parole chacun leur tour
Pour réciter une louange, porter un toast, dire qq mot sur tel ou tel de nos intervention.....
- les prises de parole peuvent être très courtes entre 1 et 5 minutes.
- le preneur de parole porte un des bâtons et le remet au suivant suivant une liste préétablie
- le preneur de parole et le suivant montent sur une estrade et parlent dans un micro (fort)
- ça serait bien que les preneurs de parole boivent dans des contenant spéciaux ??????

 

Pacha Mama
Pacha Mama

il pourrait avoir une sorte de LIBATION (liquide offert à une divinité- ici la divinité serait l'art ou la poésie ou les ex étudiants ?????)

en bolivie et argentine du nord ils célèbrent avec libation la PACHAMAMA (terre mère) : ils font un trou dans le sol appelé BOCA (la bouche) et y déposent céréales et bière etc..... ces histoires de bouches m’interpellent

+ dans la grèce antique : libation pour clôturer le banquet et débuter la beuverie

= on pourrait inventer une libation pour clôturer la cérémonie avant l'after organisé par la vie étudiante???

DES HYPOTHÈSES

- je trouverais ça super beaux que l'acte de parole soit accompagné, en contre-point, d'une activité purement physique - pendant que les uns sont immobiles à parler ou chanter, les autres courent, en silence, tout le long de la cérémonie (les tours avec bâton s'alternent avec des tours sans bâton, quand celui-ci est entre les mains des parleurs).
- si on veut créer de l'étrangeté, le meilleur moyen pour cela, ce sont des masques ! ça vous direz pas de fabriquer des masques avec tous les complices ? ou c'est trop ?
- intégrer, pour équilibrer le bien et le mal, avant ou entre les éloges, des moments de « négativité » (ou de purification) où chacun dit tout ce qui va mal.

UN MOMENT DE NÉGATIVITÉ

Dans nos premières discussions sur la cérémonie qu’on avait négligée depuis : l’idée d’un moment de « négativité » qui vienne contrebalancer les éloges, comme leur ombre en quelque sorte.
On avait parlé du rituel de cracher sur un bâton (un bâton qu’on tient à deux et sur lequel tout le monde crache en disant tout ce qui va pas et ensuite ce bâton est remis au chef). On s’est dit qu’on pouvait faire à toutes les personnes rencontrées cette double proposition : d’écrire soit un éloge soit une imprécation. On a déliré un peu en imaginant quelqu’un crier sa haine de la philosophie, ou encore, je cite julien : «  Maudit sois-tu, Einstein ! toi et ta relativité scélérate ! ». On s’est dit qu’on pouvait aussi proposer de maudire plutôt des situations existantes que des disciplines.

Comment nommer l’inverse d’un « éloge ». Une imprecation est un souhait de malheur qu’on fait contre quelqu’un, une malédiction.
Une malédiction ça va pas car ça vise à détruire alors qu’on peut juste dire « J’aime pas cette discipline ou cette situation » sans vouloir sa disparition. Par exemple, j’aime toujours pas les petit pois à cause du goût de mon vomi d’enfance qu’ils me suggèrent mais je trouve que dans la paella ils mettent de la couleur et frais ils sont doux. Un blâme, une calomnie, un diatribe, une médisance ?

LES INVITÉS

LA CHORALE DE PHILOSOPHIE

 

Bonjour,
Suite à notre rencontre de juin dernier et afin de préparer au mieux la Cérémonie que nous allons organiser pour les 50 ans de l'université, je me permets de vous re-contacter.
La chorale de philosophie est chaleureusement invitée à participer à cet événement. Afin que vous sachiez de quoi il retourne dans les grandes lignes. Voilà un premier déroulé de l'événement. (voir pièce jointe)
Avez-vous un thème de prédilection cette année?
Seriez-vous partant pour préparer des intermèdes musicaux et vocaux?
Nous avions pensé à un titre : les Kantates
Cela vous inspire-t-il?
*Lou Galopa pour INTERIM

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Bonsoir chers artistes d'Interim,
En m'apprêtant à inscrire la date à mon agenda, je m'aperçois qu'elle y
figure déjà; j'ai donc été plus efficace que ma mémoire...
A priori, rien ne s'oppose à la participation du Choeur du Département de
philosophie (évitons le terme "chorale" trop connoté, pas seulement
liturgiquement).
Nous n'avons aucun thème particulier dans notre programmation musicale:
les morceaux proviennent d'époques, de styles et de pays différents. A ce
jour nous travaillons:
- Une chanson française de la Renaissance (sur un texte de Ronsard)
- Deux Negro spirituals (en anglais)
- Une "Milonga" argentine d'Astor Piazzolla (en espagnol).
Je vous tiendrai volontiers au courant de l'évolution et vous
communiquerai une liste précise dès que nécessaire.
Vous êtes également bienvenus pour venir écouter une répétition (tous les
mardis du semestre, de 17h30 à 19h30, en salle 332 au 3e étage du bâtiment
Tertre, là même où nous nous sommes rencontrés).
Bien cordialement,

Patrick Lang
Chef de choeur
Maître de conférences (Associate Professor)
Responsable du parcours Licence de philosophie option musique
Correspondant du département de philosophie pour la mobilité internationale

Rencontre avec la Chorale (fin janvier 2012)

LA FANFARE DE SCIENCE

http://www.myspace.com/amfifanfare

LE RITUEL

Définition :

Un rituel est une séquence d'actions symboliques codifiées et organisées dans le temps. C'est un sujet d'étude pour l'ensemble des sciences humaines et sociales car c'est par les rituels que les communautés humaines se constituent, interagissent et communiquent. Les rituels marquent, dans toutes les civilisations, les grands moments de la vie des individus (naissance, mariage, mort...) et de la société (initiations, sacrements, fêtes, institutions...).

 

Les outils de l'art :

Pour un artiste, ce qui frappe lorsqu'on se penche sur les rituels, c'est qu'ils fonctionnent avec les mêmes outils et pratiquement pour les mêmes fins. En généralisant on peut dire qu'un rituel met en oeuvre des gestes et des danses, donc le corps (qui pourrait être celui d'un acteur, d'un danseur), la parole (qui pourrait être celle des poètes), des objets et vêtements (qui pourraient être ceux faits par les plasticiens), des musiques (de musiciens) le tout étant mis en scène, donné à voir, en une représentation qui doit être comprise et interprétée. Le rituel, comme l'art, fait sens.

 

Enjeux :

La modernité fait bouger les pratiques rituelles traditionnelles, déforce les anciennes formes et parfois, en crée de nouvelles. L'individualisme croissant modifie les rapport de chacun à la société, au groupe. La science contredit les mythes fondateurs de l'humanité (nous ne descendons pas d'Adam et Ève mais de bactéries) sans fournir la parole poétique qui institue la vie humaine, qui explicite la raison de vivre. Nous faisons face à un vide laissé dans nos moyens pour vivre ensemble, un vide symbolique.

 

Inventer à l'université de Nantes:

Les liturgies rituelles constituent un réservoir de formes dans lequel un artiste peut puiser. Il y a des rituels religieux et d'autres profanes. Sur le terrain de l'université un ensemble de rituels existent : les cérémonies de remises de doctorats, les bizutages, ou même les cours magistraux.

Si il est illusoire de vouloir créer des nouveaux rituels collectifs, il ne l'est pas de vouloir faire de l'art qui puise dans le vaste répertoire formel du rituel, pour faire sens, au sein d'un groupe (la population universitaire) sur le plan symbolique et émotionnel, comme de la poésie en actes.

Le chef des linguistes d'Obo assis sur les genoux d'un autre linguiste

Image historique d'un potlach
Image historique d'un potlach

Un rituel existant au sein de l'Université : Le BIZUTAGE


La pratique du bizutage est connue depuis le XII ème siècle. A l'Université de Paris les nouveaux inscrits étaient soumis à des rites plus ou moins vexants, souvent accompagnés de violence. Cette pratique continuera jusqu'à la Révolution puis elle sera reprise vers le début du XIX ème siècle par Polytechnique. Elle connaîtra une baisse de régime dans les années 60 pour repartir de plus belle en 1985. L'objectif était de soumettre les nouveaux à des disciplines qui les amèneraient à tenir tête aux autorités administratives de l'école...

Des cérémonies profanes et contemporaines, des formes proches de nous qui ne demandent pas un investissement trop lourd. Ex1 les césars - les gens sont là pour distinguer un travail, on reçoit un truc dans les mains et il faut parler, ensuite on s'en va. C'est simple.
Une inauguration, tout le monde parle chacun son tour, on coupe le ruban, on scelle la première pierre, on boit des coups.
une remise de diplomes, tout le monde passe chacun son tour, reçois un trucs, dit quelque chose (c'est simple)
L'idée des toast me plait, c'est simple et c'est connu.
Se donner un baton c'est simple et connu (le relais/témoin).
Simple et connu, c'est important, simple parce que sinon on nous suivra pas, que on sait pas bien faire et que ça risque d'être trop lourd. Connu parce que ça permet de faire sens vraiment en s'appuyant sur du réel, sur quelque chose de commun. Si les gestes rituels ne sont pas interpretables par tous (avec plus ou moins de clarté mais une base minimum s'impose) ça peut pas être une vraie cérémonie mais le mime d'une cérémonie.
Il faut trouver une procédure simple pour que les preneurs de parole puissent être convaincus. exemple : d'une main le baton, de l'autre un verre, tu t'adresses au preneur de baton suivant en faisant l'éloge de sa discipline (un texte de 20 30 lignes, pas un exposé) tu lui donne le baton, tu bois ton verre - le chœur chante et les gens du public boivent aussi. Et au suivant
Comme ce sont des universitaires, ils sont a l'aise devant un public, mais c'est pas des saltimbanques, donc s'appuyer sur leur compétences : parler en public et brillament. Du coup c'est pas ennuyeux car c'est de la belle parole.

Photogramme de la série Dr House
Photogramme de la série Dr House

Dionysies Athéniennes.

une sorte de fête institutionnelle qui dure jusque tard dans la nuit et à laquelle le vin et l'euphorie ne sont pas étrangers
quand j'entends qu'on veut alterner les prises de parole (laudatives ou crachats) avec des choeurs, je pense aux Dionysies Athéniennes.
elles se déroulaient au printemps.
le printemps, c'est la force de renouveau, l'impulsion vitale que donne le bélier sur le sol gelé de l'hiver, fendant la glace pour laisser passer ce qui pousse.
les Dionysies avaient pour but d'intégrer les citoyens au nouveau système politique (la tyrannie)

c'est là une question qui me titille : est-ce qu'on essaie d'éviter toute forme de communion (au sens large, pas forcément chrétien : quand les humains intègrent et constituent, au cours d'une cérémonie, un corps collectif) ? ou bien est-ce qu'on assume l'aspect "fabrication symbolique d'un groupe" pour notre cérémonie ? la deuxième solution est beaucoup plus dérangeante (pour moi en premier) mais elle peut aussi être très stimulante pour fabriquer un événement qui soit à la fois union et contestation - peut-être aussi en allant chercher vers le carnaval, la farce, le rire. ça irait avec notre idée de créer de nouvelles circulations : le groupe existe toujours mais en remettant en question la manière dont il existe habituellement.

La Célébration d’un mariage improbable et illimité

"La Célébration d’un mariage improbable et illimité se déroule pendant la cinquième nuit de la disparition du monde qui met six jours et six nuits à disparaître afin de se régénérer. Cette nuit-là est nuit de noce et de carnaval car est tentée, au cours d’une fête mémorable, la fusion du principe féminin et du principe masculin, l’union des espèces, des langues et des cultures, chacun apportant son pain, son vin, son chou, son kif, son eau-de-vie et son fromage et mettant en commun ses attributs, ses contes et ses blagues. Deux tribus tentent l’union par la glaire cervicale et par le sperme, par le sang et par la peau, par la salive et les vocables surgis de la profondeur des ventres contenant les mêmes ferments. Cette nuit-là est tentée l’union du ciel et de la terre, du vide et du plein, de la matière et de l’inconsistance. Mais toute fête réussie est une fête menée jusqu’aux pires excès, toute parole née du chaos retourne au chaos. Cependant, tout cheminement vers le chaos, c'est-à-dire vers le renouvellement, exige pour être bien mené une organisation précise, une gymnastique bien réglée des gestes et des paroles, beaucoup de clarté et de pureté dans l’outrance. "

http://www.franceculture.com/oeuvre-célébration-d-un-mariage-improbable-et-illimité-de-eugène-savitzkaya.html

J'ai toujours rêvé d'aller en géorgie

J'aime surtout:

Les locaux l’appelaient « le grand boire boire », ce qui signifie une libation avec plusieurs litres de vin par personne et par banquet. Cette étymologie est nécessaire pour comprendre qu’il ne s’agit pas d’un festin (pour manger) mais d’un banquet au sens platonicien du terme. C’est-à-dire une assemblée d’hommes réunie pour boire, et boire pour discourir, en observant des règles très définies qu’un responsable fait appliquer à la table.

.....

le tamada est toujours une personnalité qui a un certain charisme, une bonne image souvent construite par le rang social, la joie de vivre (l’extraversion, Fröhlichkeit). C’est aussi quelqu’un qui peut supporter de boire beaucoup de vin sans perdre le contrôle de soi, qualité physique qui n’est pas donnée à tout le monde.

http://delcour.free.fr/site_georgie/table_georgienne.html

Pour la cérémonie je trouve que l'exemple géorgien est d'une grande richesse

le tamada et son rôle dans la présidence de la réunion ainsi que les règles strictes de prise de parole sont un modèle à suivre.

Nous faut-il nommer les participants?????

Supra à la Société de géographie de Tbilissi.  Photo : Jean Radvanyi
Supra à la Société de géographie de Tbilissi. Photo : Jean Radvanyi

UN BANQUET ?

LE BANQUET DE PLATON comme source d'inspiration pour la cérémonie !

pour les non initiés comme moi : Le Banquet =  texte de Platon constitué principalement d’une longue série de discours portant sur la nature et les qualités de l’amour (eros) - autrement dit, des éloges.
ce qui me plaît bien dans l'article wikipedia à ce sujet, c'est le paragraphe suivant :
Le jeu des places musicales

Les changements successifs de places autour d'Agathon : 

                 PHEDRE - - - PAUSANIAS - ARISTOPHANE - ERYXIMAQUE - AGATHON 

                 PHEDRE - - - PAUSANIAS - ARISTOPHANE - ERYXIMAQUE - AGATHON - SOCRATE

                 PHEDRE - - - PAUSANIAS - ARISTOPHANE - ERYXIMAQUE - AGATHON - ALCIBIADE - SOCRATE

                 PHEDRE - - - PAUSANIAS - ARISTOPHANE - ERYXIMAQUE - ALCIBIADE - SOCRATE – AGATHON              

Le médecin Eryximaque organise le tour des éloges. Le jeune Phèdre en est l'initateur. Le tour commence également par lui. Il est en effet à la première place, le plus à gauche. Agathon est assis à la dernière place. Il est le plus à droite, il parlera en dernier. Aristodème qui accompagnait Socrate arrive avant lui. Agathon l’installe à côté d'Eryximaque. Socrate finit par arriver au milieu du repas et Agathon l’invite à s’asseoir juste à côté de lui. C'est désormais Socrate qui devra parler en dernier. Quand après Pausanias, vient le tour d'Aristophane, celui-ci est pris d'un hoquet. Il échange son tour avec Eryximaque, le temps que son hoquet passe. Après donc Eryximaque, puis Aristophane, puis Agathon, Socrate prend la parole pour dire le dernier éloge. Mais quand il est sur le point de terminer arrive Alcibiade ivre. Il s'assoit entre Agathon et Socrate, et sépare ainsi les deux. Il parle à son tour, et décide de faire l'éloge de Socrate. Socrate est à sa droite. Il doit à nouveau parler. Il invite Agathon à venir à sa droite pour faire son éloge. Socrate se retrouve assis entre les deux. Agathon revient à la place qui lui convient, le plus à droite. Cette dernière configuration en fait n'a pas lieu. Une bande de buveurs vient interrompre le protocole. Au lever du soleil, les seuls à ne pas encore dormir sont Agathon, Aristophane, et Socrate qui entre eux anime la discussion. Il repart après les avoir endormis, en compagnie d’Aristodème qui s’est réveillé.
D'accord pour trouver Platon sexy et frais (quoique Aristote l'est plus à mon avis) mais d'accord aussi que à l'univ c'est pas le lieu idéal pour les sortir du placard, car on essaie de les leurs faire bouffer à toutes les sauces et que ça manque vraiment d'air là-bas. Je pense aussi que si on commence à chipoter avec leur culture il va falloir bétonner pour pas avoir l'air de cruches. Je pense que ça leur ferais plutôt du bien de se prendre la notre, de culture, spontanée, informelle, décloisonnée, (dr House, Supra et Savitskaya) pour pouvoir, peut être retrouver Socrate avec plus de plaisir...mais bon je suppute mais c'est vrai qu'en tant qu'artiste en herbe j'ai souffert de ce classissisme, qu'en philo on n'étudie pas Deleuze et qu'une fille en maîtrise de lettres n'avait jamais entendu parler de Perec....

n'est-on pas démesurément fascinés par le savoir ? si on se lance là-dedans il faut aussi qu'on recoupe nos sources (wikipédia c'est une grande question dans l'enseignements : beaucoup d'élèves et étudiants en sont carrément au copié-collé).
n'est-on pas démesurément fascinés par le savoir ? si on se lance là-dedans il faut aussi qu'on recoupe nos sources (wikipédia c'est une grande question dans l'enseignements : beaucoup d'élèves et étudiants en sont carrément au copié-collé).

SYMETRIE SONORE, une perfomance à Dunkerque où deux jeunes femmes portent des toasts (extraits du Banquet de Platon) en buvant du champagne devant l'entrée du musée
Il me semble que l'écriture de toast est un super exercice difficile mais beau.

LIBRE CIRCULATION, qu'est-ce que ça veut dire pour moi ?

 

Comment, dans notre projet de cérémonie, dans ce rituel d'hommages mutuels, comment célébrer là-dedans quelque chose comme l'idéal d'une "communauté universitaire" sans tomber dans une valorisation publicitaire naïve au service de nos commanditaires ?

 

Hier en parlant avec Muriel qui travaille au service comptabilité, j'ai eu un bref moment d'illumination sur le sens profond qui pourrait se cacher pour moi dans ce titre de Libre Circulation et dans cette cérémonie. Maintenant ça a déjà pâli un peu dans ma tête - mais je crois que ça vaut la peine d'essayer de le retrouver. Pour le dire le plus bêtement possible : dans cette image de la communauté universitaire qu'on essaie de construire, c'est l'image de la communauté humaine qui m'intéresse.

 

Muriel, je suis allé la voir parce qu'elle avait répondu par mail à notre invitation pour la soirée de présentation, mais surtout parce qu'elle a eu cette réponse surprenante, dans le questionnaire, à la question : "Pensez-vous que votre domaine d’activité soit fondamental pour l’amélioration de la vie ou de l’univers ? Pourquoi ?" - Muriel : "c'est une très bonne question.  je me dis que "il faut le faire", et que dans une société rationnelle et pacifique, je ferais 3 tiers-temps : un truc matériel utile genre de la compta, un tiers temps artiste, et un tiers temps autre chose, qui reste à définir...  fondamental vous dîtes ? ... euh... l'argent, c'est pratique en fait. compter l'argent, c'est comme voir circuler l'amour dans l'univers !"

 

En face à face, elle m'a reprécisé qu'en prenant ce boulot après avoir travaillé dans le milieu associatif, elle s'était demandé si c'était utile, et qu'elle s'était dit : oui, faire de la comptabilité pour que d'autres puissent étudier, c'est utile. 

 

Je lui ai dit alors : "Est-ce que tu penses que les étudiants se rendent comptent que quelqu'un fait de la comptabilité pour qu'ils puissent étudier ? Voilà une grande question qui m'intéresse : est-ce qu'on se rend compte, nous tous, combien de personnes, à chaque instant, travaillent pour nous ? Et : si on était capables d'avoir cette conscience-là, est-ce que ça ne devrait pas transformer complètement la société ?"

 

C'est une intuition que j'ai eue plusieurs fois au cours de l'année passée, lors des courts moments partagés au sein de ce Mouvement pour la Démocratie Réelle (bien mal nommé "les Indignés") qui, je l'espère, n'en a pas fini de se lever : Qu'une démocratie plus réelle que la nôtre doit nécessairement passer par une prise de conscience tout à fait nouvelle de ce qui nous relie les uns aux autres - que ce n'est qu'en comprenant ce qui nous relie comme une énérgie vivante qu'on arrivera à se débarrasser du poids mort des structures hiérarchiques et oppressantes (qu'elles soient étatiques, multinationales ou autres) dans lesquelles nous sommes pris (que nous avons créées).

 

Ça peut sonner extrêmement simpliste et bien-pensant que de dire "on repose tous les uns sur les autres", mais plus j'y pense, plus je trouve que c'est très mystérieux en réalité. Mon rêve, depuis cette année, c'est que mon travail d'artiste, mes tentatives passées et futures de cartographier des chemins qui relient les êtres et les choses, puisse être une modeste contribution à cette prise de conscience - prise de conscience dont je pense être aussi éloigné que n'importe qui d'autre – d'où la difficulté d'en parler (c'est la première fois ici que j'essaie de le faire). Il s'agit de choses que je n'entrevois que du coin de l'œil – tourner la tête pour tenter de les voir en face, c'est assumer le risque que la vérité vive que j'entrevois, effrayée, ne se transforme en platitude. 

(Assumons.)

 

La science de ce qui nous relie porte un nom simple : l'économie. 

Une démocratie plus réelle, à mon sens, doit passer avant tout par l'invention de la démocratie économique. Par l'élaboration patiente d'autres façons, moins autoritaires, de produire et de faire circuler nos produits.

 

Quand je dis qu'on n'a encore jamais pris conscience de ce qui nous relie, le premier exemple qui me vient c'est qu'une phrase simple et lumineuse comme celle de Proudhon dans Qu'est-ce que la propriété : "Nul homme ne peut s'enrichir sans qu'un autre s'appauvrisse", reste si difficile à entendre aujourd'hui.

 

Je repense aussi à un film que j'ai vu il y a pas longtemps sur les grandes grèves de Saint-Nazaire en 1967 (dans la compilation dvd Le cinéma de 1968), qui parle à un moment de façon très belle de la solidarité qui s'est organisée autour des ouvriers restés sans salaire pendant des mois - comment certains paysans, routiers, cafetiers, etc. en comprenant que la cause des ouvriers était aussi la leur, entraient provisoirement dans une économie du don et de la gratuité… la conscience qu'on travaille de toute façon nécessairement les uns pour les autres y semblait s'illuminer un bref instant.

 

Ma réflexion retourne ici à ma petite conférence "Libérer l'argent" que j'ai proposée comme contribution pour la soirée prévue à l'amphi Kerneïs - et dont le rapport direct avec le thème de Libre Circulation m'avait échappé depuis quelque temps ! Je suis content de le retrouver de façon clarifiée.

 

La libre circulation des marchandises ET des hommes est une des principales revendications du libéralisme classique, mouvement de pensée auquel, pour le peu que j'en connaisse, je suis prêt à souscrire et qu'à mon avis il ne faut surtout pas confondre avec le capitalisme - système d'accumulation, donc de monopolisation, donc de liberté (illusoire) de l'un au dépens de l'autre. Il me semble que c'est la tâche aveugle d'une bonne partie de la pensée libérale d'aujourd'hui que de se croire soluble dans le capitalisme. Silvio Gesell, dans l'Ordre Économique Naturel (1916) que je cite dans la conférence, essaie justement d'inventer un système monétaire (la monnaie fondante) qui empêcherait cette accumulation (capitalisation). Il explique très bien la création de rareté artificielle (l'empêchement volontaire de la libre circulation, donc) qui fonde le système capitaliste :

 

"Pourquoi avons-nous trop peu de maisons ? Pourquoi tant de chômage ? Parce que l'argent actuel ne tolère pas qu'on en construise, ni qu'on embauche davantage ! Il va de soi que dans le système actuel, les possesseurs d'argent ne le prêteront pas pour des constructions ni pour des entreprises qui ne rapportent pas d'intérêt. Or, si l'offre de logements est élevée, les loyers baissent, et tôt ou tard les constructeurs ne sont plus en mesure de payer l'intérêt. Si le plein emploi fait monter les salaires, les patrons n'ont plus les moyens de servir le capital. L'argent se met alors en grève. Les ouvriers sont licenciés. La crise se déclenche. Elle durera jusqu'à ce que la rareté revienne et que le capital retrouve son rendement habituel."

 

Plus loin, Gesell cite lui-même Proudhon : "La réciprocité est la formule de la justice. Fais à autrui ce que tu veux qu'on te fasse ; ou encore, dit dans le langage de l'économie : échangez vos produits les uns contre les autres. Donnez à l'organisme social une circulation complète, et la solidarité humaine sera introduite."

 

Nous voici bien loin de ces petits échanges de paroles ou d'objets qu'on espère mettre en place pour la cérémonie ? Mais voilà l'horizon qui leur donne sens à mes yeux.

 

Un système d'échange local, comme on rêvait éventuellement d'en créer un à l'université, comme les étudiantes en économie-gestion essaient de le préfigurer, ne règle pas tous les problèmes, mais… c'est un système monétaire qui interdit l'accumulation capitaliste. 

 

Continuant ma petite dérive matinale qui me fait en ce moment même rater le discours de candidature du futur président de l'Université de Nantes, je voudrais revenir une dernière fois peut-être à cette citation de Beuys que je vous avais sortie à un moment donné de notre vieille discussion autour du nom Intérim et de l’idée d’entreprise artistique. « L'art ne peut plus être de l'art aujourd’hui s'il ne pénètre pas en agent transformateur au cœur de notre culture actuelle. Et notre culture, celle qui informe chacun de nous, est une culture économique, marchande. Un art incapable d'agir sur les questions centrales de cette société – telle la question du capital – n'est pas de l'art. Pour rendre l'art effectif, il n'y a pas d'autre champ d'action que de changer les modalités de production économique. Le but de la notion élargie de l'art est la libération du travail ! »

 

J'ajoutais dans un mail de 2005 : "Sans partager cette intransigeance, je pense que nous aussi on opère dans le champ de la notion élargie de l’art, et personnellement la « libération du travail » est un de mes rêves les plus fous. J’aime bien le nom Intérim parce qu’il signifie pour moi, justement, l’aliénation du travail, et je trouve (pour traduire littéralement un concept cher à Beuys qu’il emprunte aux principes de l’homéopathie) que c’est une « contre-image » efficace. C’est comme utiliser du gris pour produire de la couleur."